Garantie décennale : des précisions
Garantie décennale : pour quoi ?
Le principe. Comme cela vient d’être rappelé, tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit envers un maître d’ouvrage (MO), au titre de l’article 1792 du Code civil, de dommages survenant après réception, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de cet ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination (Cass. 3e civ. 12.11.2020 n° 19-22.376) . La garantie décennale peut jouer y compris en cas d’inondations/infiltrations du sous-sol d’une maison. Pour un sous-sol, une certaine humidité peut parfois être admise, mais si le seuil acceptable est largement dépassé, des désordres peuvent être considérés comme générant une impropriété à destination (Cass. 3e civ. 12.11.2020 n° 19-20.831) .
Éléments d’équipement. La garantie décennale peut être due au titre d’un contrat de fourniture et de pose d’une installation de chauffage incluant la fourniture et mise en place d’une installation de climatisation (avec pose d’éléments dans/à travers des murs, ce qui vaut construction d’un ouvrage), si elle n’est pas d’une puissance suffisante pour lui permettre de fonctionner normalement et d’être pérenne (Cass. 3e civ. 12.11.2020 n° 19-18213) . Il peut en aller de même pour de graves désordres touchant une pompe à chaleur (Cass. 3e civ. 26.11.2020 n° 19-17.824) . Attention ! Au titre de l’article 1792-2 du Code civil, des désordres affectant un élément d’équipement, dissociable ou non, relèvent aussi de la garantie décennale lorsqu’ils rendent un ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination. La garantie peut être recherchée pour des désordres d’isolation phonique résultant du défaut de montage de portes (Cass. 3e civ. 23.09.2020 n° 19-20.282) .
Conseil. Les dommages relevant de la garantie ne peuvent donner lieu, contre une personne tenue à la garantie, à une action en réparation sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun (Cass. 3e civ. 12.11.2020 n° 19-22.376) .
Garantie décennale : quel régime ?
Qui peut agir ? Pour la Cour de cassation, l’action en garantie décennale, reconnue au MO, se transmet en principe avec la propriété de l’immeuble concerné. Ainsi, si le bien concerné est vendu par le MO, l’action en garantie se transmet à l’acquéreur. Toutefois, un MO ne perd pas la faculté d’exercer personnellement l’action en garantie « quand elle présente pour lui un intérêt direct et certain » . Tel est le cas si un MO a été personnellement condamné à prendre en charge la réparation des vices de l’immeuble (Cass. 3e civ. 12.11.2020 n° 19-22.376) .
Pendant combien de temps ? Un texte précise que toute personne, dont la responsabilité peut être engagée au titre de l’article 1792 du Code civil, est déchargée de la responsabilité et garantie, pesant sur elle, après dix ans à compter de la réception des travaux concernés (C. civ. art. 1792-4-1) . Pour la Cour de cassation, le délai de la garantie décennale est un « délai d’épreuve » . À ce titre, toute « action, même récursoire, fondée sur cette garantie ne peut être exercée plus de dix ans après la réception des travaux » concernés (Cass. 3e civ. 12.11.2020 n° 19-22.376) .
Ce qu’il faut aussi savoir
Gare aux contrats ! Toute clause d’un contrat qui a pour objet d’exclure (ou limiter) la garantie, est « réputée non écrite », c’est-à-dire illicite (C. civ. art. 1792-5 ; Cass. 3e civ. 19.03.2020 n° 18-22.983) .
Gare à la note à payer ! Au titre de la garantie décennale, un MO peut réclamer et obtenir réparation de l’intégralité de ses préjudices, y compris immatériels (Cass. 3e civ. 09.07.2020 n° 19-18.954) .
Gare aux assurances ! Il a été rappelé avec fermeté que toute personne (physique ou morale), dont la responsabilité peut être engagée sur le fondement de la présomption posée par l’article 1792 du Code civil doit être couverte par une assurance en ordre en responsabilité civile décennale – RCD (Cass. 3e civ. 05.11.2020 n° 18-18.341) .
Veillez à souscrire et disposer d’une assurance en ordre pour la couverture des désordres susceptibles de relever de la garantie légale au titre de certains travaux ou de l’installation de certains équipements, garantie qui peut être recherchée par un client (y compris parfois après la vente du bien concerné) pendant dix ans après la réception des travaux ou de l’ouvrage.